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La magie du chaos, par Peter J. Caroll

Traduction (douloureuse) & Adaptation : Frater Eradikator

Crowley a certainement contribué à mettre un sérieux coup au monothéisme, mais le processus était déjà bien engagé. La Science, qui avait progressivement émergé de la magie de la renaissance, a plus ou moins donné l’image d’un monothéisme parasite des cultures avancées. Crowley était enthousiaste à propos de la Science et de façon appropriée pour son époque, mais dans le travail de Austin Spare, on commence à détecter un certain pressentiment.

Cependant c’est le travail de Spare, qui apparaît plus austère et scientifique comparé aux extravagances symboliques et baroque de Crowley. Spare rejetait la symbolique classique des âges oubliés et concevait la magie à partir de ses propres arcanes. En usant un minimum d’hypothèses, il a crée une magie provenant de sa propre mémoire raciale et son subconscient. Indépendamment des systèmes complexes, il a développé des techniques d’enchantement et de divination efficaces utilisant un langage et des images courantes. Le travail de Spare frome le pont entre un style ancien de magie arrivé à maturité avec Crowley (dont l’interêt, le pouvoir et le potentiel libérateur dérive de son style religieux d’anti-religion) et la nouvelle magie.

La nouvelle approche se caractérise par une sorte d’anti-science scientifique. C’est devenu de plus en plus connu sous le vocable de Chaos-Magick. Cela ne serait plus utile de caractériser la Chaos-Magick comme une pseudo science que de caractériser les idées de Crowley comme une pseudo-religion. C’est l’astrologie telle qu’elle est pratiquée qui est plus une pseudo-science autant que le satanisme et la franc-maçonnerie sont des pseudo-religions.

La Chaos-Magick entreprend de montrer qu’il n’y a pas que dans les interstices de la sciences que la magie s’épanouit, mais plutôt que les plus hautes atteintes des théories scientifiques et l’empirisme, se demandent si la magie existe. C’est quelque chose d’analogue à la manière dont les théories religieuses impliquent la possibilité de la Théurgie ou de la Goétie.

La meilleur magie a toujours eu un fort arôme antinomique. Les magiciens les plus remarquables ont invariablement combattu les normes et obsessions culturelles qui prévalaient. Leurs victoires ne représentaient pas seulement une libération personnelle mais aussi une avance pour l’humanité.

L’histoire ne nous a pas légué d’écrits des magiciens shamans renégats qui ont amené l’avent du paganisme, mais nous en savons un peu sur les mages anti-païens qui ont créé le monothéisme : Akhenaton, Moïse, Gautam etc. Comme le monothéisme devenait de plus en plus une force obscène et répressive, une nouvelle génération de magiciens est apparue pour la combattre. Certains se battirent trop ouvertement et furent détruits ; d’autres furent plus subtils et plantèrent d’efficaces graines de destruction d’un point de vue philosophique, alors que d’autres hâtèrent sa destruction en poussant les idées théologiques et théurgiques jusqu’à des conclusions outrageantes. Le hall d’honneur est là plus étendu, incluant des personnalités notables telles que Giordano Bruno, Cornelius Agrippa, John Dee, Cagliostro, Eliphas Levi, et récemment Aleister Crowley.

La plus grande réussite de Crowley, mis à part sa moralité futuriste et himmalayenne a été de déterrer les puissantes techniques du Tantra, Yoga, Gnosticisme, Taoisme et Chamanisme. Il a eu le courage de les appliquer à l’occultisme desséché et intellectualisé de son temps, et a créé quelque chose d’une indéniable valeur et intérêt. De mon point de vue, l’erreur de Crowley a été d’accepter ses visions mystiques comme des révélations et de devenir dogmatique à leur propos. Il découvrit les techniques pour libérer l’extraordinaire pouvoir et créativité de l’hémisphère cérébral droit, mais fut si surpris du résultat qu’il convint que c’était d’origine inhumaine, et tout cela malgré son axiome que ….il n’y a pas de dieux, mais l’homme.

Ce que les magiciens du Chaos entreprennent de faire c’est briser la vison réductrice que la science et le rationalisme ont de notre imagination et de forcer la science à muter vers quelque chose de moins oppressif. Pour ce faire, ils ont sélectionné comme armes un certain nombre d’idées simples. La Chaos Magick se concentre sur la technique. En dessous de tous les systèmes, de la Sorcellerie à la magie tibétaine, que le magicien ouvert d’esprit peut utiliser, il y a une unité fondamentale de techniques pratiques dépendant de la visualisation, la création de formes pensées, et les états de conscience altérés par des méditations soit « passives » soit extatiques. Ce point de vue éclectique implique que la croyance elle même peut être considérée comme une technique pour atteindre ses buts. Une implication plus profonde du principe de relativité des croyances est que toutes les croyances sont considérées comme arbitraires et aliénantes. En conséquence, toutes les notions de vérités absolues n’existent seulement que si nous choisissons d’y croire à un instant donné. Le revers du principe que « rien n’est vrai » est que « tout est permis » et les magiciens du chaos, peuvent souvent créer d’inhabituelles « hyperscience » et schéma sorciers de la réalité, comme trame de travail pour leur magie.

Une connaissance neurophysiologique améliorée combinée avec le principe de relativité de la croyance peuvent mener le magicien moderne à aborder la notion de révélation avec un rafraîchissant scepticisme. Les parts insoupçonnées de nos cerveaux peuvent être bien plus créatives que les parts conscientes, et ni message venu des dieux, ni une extraordinaire expérience, ne peuvent être considérées comme des preuves de quoi que ce soit d’autres que nos propres pouvoirs, même s’ils sont accompagnés de miracles.

Le rejet de toute réalité externe, vérité ou signification peut sembler un principe paradoxal voire horrible pour construire une quête spirituelle. Personnellement je ne le pense pas. Une vérité absolue signifierait une tyrannie absolue, et historiquement cela a été toujours le cas. Je préférerais la liberté de forger ma propre vision spirituelle. L’évidence de mes sens me suggère que l’univers est basiquement constitué au hasard de limites arbitraires qui elles mêmes se forment capricieusement. La réalité est une hiérarchie d’accidents réglée par chance. Même les bien nommées lois scientifiques, sont seulement des approximations statistiques décrivant les types d’accidents les plus persistants. Je suis libre, non pas parce que la liberté m’a été donnée mais comme la conséquence d’être une création purement accidentelle accompagnée de schémas aux comportements hasardeux.

La Chaos Magick implique nécessairement un certain apolitisme individualiste voire même l’anarchisme. C’est vraiment une illusion de croire que les gens sont dominés par la politique. Les gens sont dominés par les philosophies et les modes, et c’est de ce plus haut niveau que la Chaos Magick lance son attaque sur la réalité. Pratiquer la magie implique que vous allez activement chercher à forger votre propre point de vue spirituel, souvent en contradiction avec les normes admises. La magie s’élève au plus haut lorsque les limites du « soi » (self) sont soit élargies soi contractées. Par exemple, pendant les époques d’innovation et de découvertes, ou les époques de répression. Une profonde renaissance magique est maintenant en marche parce que les limites du « soi » sont à la fois plus étendues et contractées simultanément. La science, les drogues, les réseaux de communications et tout l’attirail du dernier siècle ont étendu les aspects de la conscience à un degré inconcevable il y a un siècle.

Dans le même temps, bien des aspects de la civilisation industrielle nous oppriment et empiètent sur le territoire du « soi ». Les allégories enfantines des religions ont été jetées par dessus bord, mais le principe du « soi » en tant qu’entité mystique a acquis plus de matière dans le processus. L’environnement naturel a été détruit pour nourrir le béhémoth industriel et notre capacité à nous y relier va en diminuant.

Comme les pas de la vie sont devenus plus frénétiques, la valeur de l’introspection a diminué, exceptée dans l’art où il est encouragé d’être grotesque.

Le consumérisme et la perspective d’un armaggedon thermonucléaire (avec ce que cela semble impliquer) pourrait nous diminuer bien davantage. Entre ceci et les pressions sur le « self », la magie a poussé comme un champignon et pris une coloration bien distincte versus ses antécédents historiques. Ainsi on arrive à un extraordinaire éclectisme et dans le même temps, la physique quantique accompagne le shamanisme et les pratiques tantriques sont employées pour des buts parapsychologiques en utilisant des expériences télépathiques arrangées par un lien satellite entre des microprocesseurs personnels tandis qu’un ancien encens goétique fume sur le bord d’un encensoir fait main.

Une renaissance est marquée par le présence de personnes qui la construisent, et le magicien contemporain est vraiment une figure de la renaissance dans le sens où le terme est habituellement utilisé. Contemporain des conventions et paradigmes de son temps, il regarde à la fois devant et derrière pour acquérir les techniques pour les circonvenir. La religion et la magie néo-religieuse qui le combattent sont mortes ou mourantes. Que s’élève le Sorcier-scientifique !

Provient du site de Phil Hine : http://www.phhine.ndirect.co.uk/

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